Collectif national pour les droits des femmes

Corps, sexualité, santé

Communiqué

Les “ bien pensants ” et les experts contre les femmes

mardi 4 juillet 2000

Le Collectif pour les droits des femmes, réuni le 3 juillet 2000, s’alarme de la dérive actuelle concernant les droits des femmes et la liberté dans notre pays. Une série de faits témoignent de l’influence de l’intégrisme et marquent de graves reculades du gouvernement face à la pression des réseaux familialistes les plus droitiers ou face au mandarinat médical.

Les raisons de s’alarmer sont multiples :

- La décision du Conseil d’État de casser la circulaire de Ségolène Royal autorisant la distribution du Norlevo par les infirmières des collèges ; sans aucun doute, cette décision qui se réfère à la loi existante était à craindre. Elle contrevient cependant à la directive européenne autorisant la distribution sans ordonnance de médicaments non dangereux : le Norlevo, ne contenant pas d’œstrogènes, en fait partie (cf. sa vente libre en pharmacie : serait-elle aussi menacée ?). Il n’en devient que plus urgent de réviser la loi sur la contraception, ce que le gouvernement promet de faire. Nous nous en réjouissons, mais la partie n’est pas gagnée. Ce qui serait à craindre, c’est que la loi soit juste assouplie ce qu’il faut pour permettre d’appliquer la circulaire concernant le Norlevo, mais que cela dédouane le gouvernement face à d’autres enjeux graves, et principalement le droit à l’avortement.

- Le recul de Martine Aubry concernant l’assouplissement de la loi sur l’avortement. Cette loi présente de graves carences : délai de 10 semaines insuffisant pour environ 5000 femmes qui sont obligées d’aller avorter à l’étranger (plusieurs pays d’Europe en sont à 12 semaines), rigueur concernant l’autorisation parentale pour les mineures (dans certaines structures cela va jusqu’à exiger la présence d’un des parents !), 3 mois de séjour pour les immigrées en détresse (et parfois la carte de séjour est exigée !).
Le rapport officiel du Professeur Nisand dénonçait en mars 99 les insuffisances de la loi. Le silence du gouvernement fut enfin relayé par des promesses répétées, en juillet, novembre, puis à la suite de la manifestation du Collectif du 15 janvier 2000. Enfin le 8 mars, Martine Aubry réitère un accord concernant l’allongement des délais, mais fait montre d’hésitations concernant les mineures et se tait sur les immigrées. Il est regrettable que la ministre ait suivi le lamentable revirement du professeur Nisand. Ses arguments sont révoltants et témoignent d’un mépris total pour les femmes et de la suffisance des “ experts ”. Il n’est heureusement pas suivi par tous ses confrères ! D’autres voix s’élèvent.

-  La relaxe, par la Cour de Cassation, de Xavier Dor, mis en examen pour des manifestations anti-IVG (en 1998 et 1999), interdites par le Préfet de Police de Paris. On assiste depuis plusieurs années, à une remise en question de la loi Neiertz sur le délit d’entrave à l’IVG.

- Enfin l’interdiction de la diffusion du film “ Baise-moi ”, sauf en salles X, sous la pression d’associations familiales et sous l’égide d’un mégrétiste. Ceci rappelle une époque que l’on croyait révolue.

Tout ceci manifeste la réaction frileuse du gouvernement et des pouvoirs publics face à l’évolution de la société, face à l’attente des femmes, mais aussi des hommes sensibles aux droits et aux libertés conquises. Ils attendent autre chose d’une gauche qu’ils ont élue, autre chose qu’une capitulation à l’approche des élections.

Peut-on encore espérer que les promesses seront suivies d’effet ? Le Collectif national pour les droits des femmes demande solennellement au gouvernement de redresser la barre, de refuser les diktats des hommes de pouvoir, mandarins ou autres, sur les femmes traitées comme des irresponsables. La morale des “ bien pensants ” n’est pas une morale dynamique à la hauteur des enjeux de notre société.

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